mercredi 7 août 2013

125ème : 9 USED APPEL URGENT à une MICRO-SOLIDARITE FESTIVE…


(Ne soyez pas étonné par quelques regrettables bizarreries de police des caractères typographiques qui se manifestent, j'en suis désolé, mais l'essentiel, n'est-ce pas, est le fond, plus que la forme)


Bonjour aux lecteurs habituels de ce blog et bienvenue aux nouveaux qui le découvrent à l’instant, avec cet appel urgent, un peu désespéré. Ce blog personnel intitulé « Regards du Sud » et sous-titré : « Comment construire tous ensemble un monde plus fraternel ? » tente depuis une dizaine d’années de répondre à cette vaste question.

Situons brièvement cet APPEL dans son contexte, à travers deux extraits de précédents épisodes : 
-en décembre 2012, j’évoquais mes réflexions et perspectives futures :

« Comment mieux Vivre Ensemble » tous azimuts ? (du niveau personnel à l’échelle planétaire) », en survolant nos chemins de Vie avec cinq priorités personnelles : 1-nos liens de proximité, 2-l’attention aux plus fragiles et aux cabossés de la vie (jeunes, malades, handicapés, personnes âgées), 3-le dialogue interreligieux, 4-les merveilles du cosmos, 5-la poursuite de mes recherches sur le « Vivre Ensemble ».
-en juin 2013, j’allais résolument plus loin sur le 2ème point :
«…  je vous présente un beau projet, une belle aventure humaine bien engagée, que nous initions et pilotons, Chantal C. et moi, en binôme valide/handicapé, intitulée :


 "Alliances valides/handicapés", mais qui pourrait aussi se nommer « Colibris(Handicap) Béarn ». La clé de ce projet est qu'une "alliance valide/handicapé" est, à mes yeux, un levier extraordinairement plus puissant qu'une "alliance valide/valide" pour construire un monde plus fraternel, car la personne handicapée a souvent fait un long cheminement vers le changement, en relation avec les propos de Gandhi « Soyons le changement que nous voulons pour le monde ».

Aujourd’hui, 7 août 2013, ce nouveau projet solidaire avance très bien par certains côtés et de façon moins brillante par d’autres, ce qui motive cet « appel urgent à une micro-solidarité festive… ». Analysons ensemble sereinement la situation : tous les mois, une sortie importante est organisée, au service de personnes handicapées, grâce à un mini geste de solidarité de bénévoles, qui peut se résumer à « covoiturer une personne non autonome » vers de bons moments partagés.
Concrètement, pour le mois d’août, la présentation de cette sortie est la suivante :



I-Alliances valides/handicapés : ciné « Intouchables » sous le ciel de Sendets le 13 août 2013 :

Dans le cadre de la fête du village de Sendets, la sortie est centrée sur cette séance de cinéma en plein air, au cœur du village, avec le film « Intouchables ». Préalablement à 20h30, une courte rencontre à la Margelle, à proximité immédiate, permettra de mieux connaître ce lieu magique, qui abrite notamment une « alliance valides/handicapés », l’Alliance de la Margelle.

 

Postérieurement, quelle que soit la météo, une initiation à la connaissance du ciel s’effectuera soit directement sous les étoiles, soit en salle avec logiciel « astronomie ».
Le lieu de rendez-vous est à la Margelle, au 6 rue Henri IV à Sendets, à proximité immédiate du stationnement des voitures, que sont les parkings de l’église et de l’école.
Pour aller à Sendets à la Margelle, prendre la route de Tarbes et au village de Ousse, tourner à gauche en suivant le plan ci-joint : 
http://lamargelle.pageperso-orange.fr/francais/plan/planpsd.html .

                 
Où en sommes-nous, à six jours, de cette sortie gratuite cumulant « solidarité +film+ fête de village+initiation astronomie » 
 Après avoir présenté cette sortie à plusieurs centaines de personnes, à travers quelques associations, le bilan est le suivant :
-perspective de quelques rares participants valides et handicapés,
-aucun retour d’associations à vocation « service » et à centaines d’adhérents,
-trois personnes handicapées désireuses de venir mais condamnées à rester chez elles.

II-L’« Appel urgent à une micro-solidarité festive… » s’exprime donc ainsi :
Parmi le millier de personnes qui liront ce texte ces jours-ci, situées dans le grand Pau, n’y aurait-il pas au moins trois personnes qui seraient disponibles et disposées à passer une excellente soirée le 13 août en permettant ce soir-là, à trois personnes handicapées physiques, de sortir de leur enfermement ?

Merci infiniment aux trois personnes et aux autres, qui, j’en suis sûr, se manifesteront rapidement sur ma messagerie jacques.mortier@gmail.com ou sur celle de Chantal chantal.courtade@gmail.com  (ma réponse ne sera pas forcément immédiate, car demain jeudi, je serai à Sète/Frontignan, vendredi ou samedi peut-être à Bayonne, dimanche à Bordeaux et la sortie est mardi prochain).

III-«Appel à une micro-solidarité » :

Un mot préalable : on dit souvent qu’on juge une civilisation au sort réservé aux plus démunis, aux plus fragiles, aux plus cabossés. 

Dans le même esprit, reprenons les propos de Gandhi « Soyons le changement que nous voulons pour le monde », ce qui veut dire que si nous voulons un monde solidaire et fraternel, la solution est archi connue et tout en découle, c’est de devenir soi-même plus solidaire et plus fraternel.
Prochainement, dans le cadre de ce projet « Alliances informelles (valides/handicapés) » et sans la même urgence, un appel sera lancé individuellement sur ce blog, comme une bouteille à la mer, à chacun, quelle que soit sa situation, son statut, ses engagements, ses difficultés… pour lui permettre : 
-de s’inscrire dans cette dynamique solidaire, cette dynamique de Vie,
-de donner ainsi plus de sens à sa vie,
-de sortir de l’enfermement des personnes qui n’ont pas demandé à être handicapées,
-…
A priori, nous sommes tous des « Alliés » potentiels, si nous sommes prêts dans notre Vie actuelle, à donner 3 petites heures/mois pour accompagner ou covoiturer une personne plus dépendante. Mais nous en reparlerons.
D’ores et déjà, nous pouvons vous présenter ci-dessous, la sortie « Alliances » de septembre 2013.

IV- Alliances valides/handicapés : astronomie : « Les Merveilles du cosmos » le 14 septembre 2013 :

Dans le cadre de sa séquence estivale astronomique, l’intervenant sendetsois dévoilera « les Merveilles du cosmos », en commentant de belles images, en vue de « connaître, comprendre, contempler » notre Univers. Cette séance se tiendra au foyer municipal de Sendets, entre l’église et la mairie. Elle sera gratuite, ouverte à tous, avec libre participation ''agréable SURPRISE'' au profit de personnes handicapées. 

L’intervenant, astronome amateur de longue date, participe depuis une douzaine d’années à des missions d’observation du soleil au Pic du Midi de Bigorre, comme « Observateur Associé (OA) », au coeur du projet CLIMSO : http://www.climso.fr/index.php/fr/observateurs-associes . 
Pour ceux qui voudraient en savoir plus et se mettre dans l’ambiance, il est possible d’aller également consulter ou télécharger ses émissions de radio d’initiation à l’astronomie : http://jackdesendets.free.fr/DC/DecouverteCiel.pdf .


vendredi 21 juin 2013

124ème : 8 USED Lancement du projet ALMA "ALLIANCES VALIDES/HANDICAPES"

Que le temps passe vite : voilà longtemps que je n’ai pas rajouté un épisode à mon blog, c’est le signe que ma Vie est débordante. Aujourd’hui, je vous présente un beau projet, une belle aventure humaine bien engagée, que nous initions et pilotons, Chantal C. et moi, en binôme valide/handicapé, intitulée : "Alliances valides/handicapés", mais qui pourrait aussi se nommer « Colibris(Handicap) Béarn ».

La clé de ce projet est qu'une "alliance valide/handicapé" est, à mes yeux, un levier extraordinairement plus puissant qu'une "alliance valide/valide" pour construire un monde plus fraternel, car la personne handicapée a souvent fait un long cheminement vers le changement, en relation avec les propos de Gandhi « Soyons le changement que nous voulons pour le monde ».

Je vous propose trois temps :
I-le premier avec le compte-rendu du lancement de cette Alliance,
II-le second avec une émission radio, que j’animais alors, avec un beau témoignage sur la « rencontre de la différence » au sein de l’association « Vivre Ensemble »,
III-le final avec deux poèmes récapitulant ce projet.

I-Lancement du projet « Alliances Valides/Handicapés »
Compte-rendu n°1 (13 juin 2013) à La Margelle 6 rue Henri IV Sendets 64320

Préalable : ce compte-rendu, fidèle dans l’esprit, se veut support d’informations et argumentaire pour tous ceux qui seraient intéressés et que nous souhaitons très nombreux.

Présents : 16 personnes au départ envisageaient leur éventuelle présence, et 8 étaient effectivement présentes : Elisabeth C, Chantal C, Bernadette H, Raymonde C, Simone D, Henia T, Véronique C et Jacques M. Huit personnes, excusées d’office : Monique L-P, Sylvette I, Claude R, Roseline D-R et son papa, Michel S, Philippe O et Philippe T.

Accueil (café, gâteaux…) très important pour le lancement de cette belle aventure humaine.
Présentation de chacune et de chacun : afin de « mieux se connaître pour mieux se comprendre ». Les participants viennent de divers horizons d’amitié : l’Hospitalité Basco-Béarnaise (HBB), l’équipe des « Mouettes » de la plaine de Nay, des voisinages, de l’Université de Pau (CIEH : Certificat International d’Ecologie Humaine)… 

Genèse de ce projet : l’initiateur Jacques M explique qu’il y a six « germes proches » à ce projet :
-le 1er est sa rencontre, au réveillon solidaire de la Margelle le 31 décembre 2011, avec Elisabeth C puis son accompagnement hebdomadaire depuis, en immersion profonde dans le monde du handicap, de la souffrance et du désespoir,
-le 2ème est sa fidèle implication depuis 15 ans à l’association « Vivre Ensemble » tous les jeudis de l’Ascension, en amitié avec Françoise et Pierre Guillaume, eux-mêmes, en responsabilité à l’HBB,
-le 3ème est sa récente appartenance, comme hospitalier, à l’HBB avec pèlerinage à Lourdes et prochainement également à Rome,
-le 4ème est le constat qu’il existait déjà, depuis 7/8 ans, sur l’Est de Pau, une belle « alliance valides/handicapés », appelée « Les Mouettes »,
-le 5ème est l’existence, sur son village de Sendets, d’une association « Les Amis de la Margelle », un lieu-ressource solidaire, où il se trouve en responsabilité,  
-le 6ème, déterminant, est la rencontre à l’HBB avec Chantal C, qui a l’expérience des Mouettes, une belle énergie et est prête à s’investir dans le binôme d’animation de ce projet.

Notre projet brièvement, en cohérence avec le charisme de notre nouveau pape François : d’abord l’écoute prioritaire de la personne handicapée, ensuite la richesse potentielle des apports réciproques handicapés/valides et enfin la multiplication de ces alliances un peu partout. Pour faire bref, le projet pourrait s’exprimer ainsi : « Sortir de l’enfermement des personnes handicapées indépendantes chez elles, mais dépendantes pour sortir, avec un coup de main de bénévoles valides, en s’appuyant sur des sorties/rencontres organisées ailleurs ou sur mesure ».

Esprit : c’est une alliance d’amitié, légère, ouverte, non administrative, qui veut tisser du lien entre valides et handicapés, pour faire évoluer les regards, en s’appuyant sur l’existant, sans créer de structures nouvelles mais en reliant personnes, associations, entités diverses qui partagent des valeurs voisines de solidarité. Chacun dispose de sa totale liberté pour s’impliquer, un peu ou plus, et chacun doit pouvoir trouver réponse à ses attentes mais aussi à ses apports souhaités, en se faisant PLAISIR. 
« Chacun de nous est unique et merveilleux et Ensemble, nous pouvons tout ».

Alliance de base :
La création d’une alliance, qui doit rester à dimension humaine, s’appuie sur quelques « ingrédients » :
1-un initiateur volontaire (valide V ou Handicapé H),
2-constitution d’un binôme V/H de base (animation, information partagée, trait d’union),
3-mobilisation de bénévoles « pousseurs (de fauteuils) potentiels », au minimum ½ journée par mois,
4-liste de personnes handicapées, intéressées,
5-propositions de sorties/rencontres en relation avec diverses associations et avec l’ « Alliance pilote de la Margelle »,
6-accueil/hébergement éventuel « des personnes alliées » par une association volontaire.
Concrètement, une alliance de base existe dès la présence d’un binôme V/H avec une sortie, rencontre ou partage ½ journée par mois, avec une volonté d’élargir si possible cette équipe et en relation souple avec le binôme d’animation. 

Alliance « pilote » de la Margelle :
C’est d’abord une alliance de base, où le binôme fondateur est Chantal C/Jacques M. et où le lieu ressource de la Margelle, disposant d’une belle salle équipée, pourra être utilisé pour des rencontres, présentations… conformément au statut de l’association « Les Amis de la Margelle » : « animer le lieu de vie…dans un   esprit de rencontre, fraternité et ressourcement personnel » et en cohérence également avec le statut de l’HBB : « créer une communauté de générosité, fraternité, spiritualité entre valides et handicapés », prenant en compte un des buts principaux « visiter, accompagner, assurer un suivi avec les personnes malades ou handicapées, tout au long de l’année ».
Cette alliance pilote/laboratoire de la Margelle, composée de personnes adhérentes à l’association locale des « Amis de la Margelle » (cotisation : 10€) aura bien sûr pour vocation de vivre pleinement cette relation de proximité, cette alliance d’amitié, mais aussi de faciliter l’émergence de multiples alliances un peu partout (unités de l’ordre d’une dizaine de personnes handicapées maximum).
  
Activités programmées à la Margelle :
Les deux évènements majeurs de l’association des « Amis  de la Margelle » sur Sendets, que sont le « Feu de la Saint Jean » (22 juin 2013) et le « Réveillon de la Saint Sylvestre » devraient bénéficier de la présence de « l’Alliance ». Et certaines sorties/projections proposées sur place à la Margelle seront ouvertes à tous les  adhérents des « Amis de la Margelle ».
Dans l’immédiat et à chaud, au-delà de Jacques, 4 personnes ont adhéré aux « Amis de la Margelle » (Véronique C, Bernadette H, Chantal C, Raymonde C) 4 devraient être présentes au Feu de la Saint Jean (Bernadette H, Chantal C, Elisabeth C, Eliane T) et 3 au Réveillon de la Saint Sylvestre (Chantal C, Raymonde C, Elisabeth C).

Echanges sur les activités souhaitées et possibles :
La force de ces alliances s’appuie sur deux leviers majeurs : la mobilisation de bénévoles et les propositions de sorties. Et l’écoute de chacun sera essentielle pour avancer ensemble. Concrètement, pour démarrer, il sera possible de s’appuyer sur de nombreuses associations/entités où Jacques M s’est impliqué : AMIEZ (bénévoles et sorties), HBB (bénévoles), Astronomie, Aumônerie, Amis de la Margelle, Vivre Ensemble, Mouvement Colibris, CIEH, Emmaüs, Foyer-logement des Pères Blancs, Kibouge…

Il existe également des outils précieux :  www.cdrp64.com/sentiers-et-topoguides/les-balades-à-roulettes .
Il s’agit ici du démarrage et des premières pierres posées, mais l’expérience montrera et montre déjà l’extraordinaire fécondité potentielle de cette alliance V/H. A très bientôt.

Pour découvrir, loger éventuellement, et surtout accéder à ce lieu-ressource et magique qu’est la Margelle : http://lamargelle.pagesperso-orange.fr . C’est en quelque sorte un éco-quartier, basé sur la solidarité, Jacques M, correspondant Colibri Béarn, habitant au 4 rue Henri IV.


II-Rencontre de la différence avec « Vivre Ensemble »





http://www.veosmarsillon.fr Soyez attentif à cette association extraordinaire, évoquée dans notre projet. A l’époque où j’animais des émissions radio, j’avais eu beaucoup de joie à interviewer Françoise et Pierre Guillaume, avec leur superbe témoignage sur la « rencontre de la différence » au sein de l’association « Vivre Ensemble ».
Vous noterez que cette émission s’illustre d’entrée par Virginie, déguisée en clown, sur son fauteuil et que quelques sept ans plus tard, nous la retrouvons en mère attentive, avec son petit Mathis, photographiée il y a déjà un peu de temps, probablement par le papa Franck. Le 9 mai 2013, nous avons eu le plaisir de les retrouver tous les trois à la journée « Vivre Ensemble » à Os-Marsillon.










III-Projet récapitulé en deux poèmes
Vous aurez noté que l’émission citée s’achève sur un magnifique poème, à forte densité émotive, d’Annie M, poète et judokate, fidèle de longue date à « Vivre Ensemble ».
Dans le même esprit, en me remémorant les visages de tous ceux, plus ou moins cabossés par la vie, que j’ai accompagnés et aimés au fil des années, j’ai écrit en ce mois de mai 2013 un premier texte « confidentiel » à l’ami en souffrance et puis rapidement un second, qui amorce et récapitule notre aventure humaine en marche.  







CONFIDENCE
A l’Ami en souffrance, connu ou inconnu

Ce soir il est bien tard, malgré tout, j’aimerai
Quelqu’instants avec toi, rêver et j’oserai,
Peut-être, au fil des mots, livrer dans le silence,
Toutes mes pensées intimes, voltigeant en cadence.

Chanceux toujours je fus, grandissant avec joie,
Curieux souvent de tout, sans en sentir le poids.
Les dieux me furent cléments, privilège abusif,
En vue de quelle mission, j’en suis toujours pensif.

Et si c’était la joie, de Vivre et donc d’Aimer,
Qu’il me fallait transmettre, sans répit, sans chômer,
A tous  ceux qui galèrent, sans espoir et sans lien,
Désespérés parfois, ne croyant plus en rien.

Il y a peu de temps, ton sourire m’a frappé,
J’appris à te connaître, à t’aimer d’amitié.
Ton histoire me toucha, j’en fus bouleversé,
Demain dans la durée, ton destin inversé !




 
ALLIANCES INFORMELLES
Fauteuils/baskets (valides/handicapés !)

Que fleurissent partout, d’informelles Alliances,
Où, cœur à cœur unis, Belle Dame Reliance
Déclenche l’Espérance, pour nous, pauvres Humains,
Bourrés de grands talents, mais nuls pour voir demain.
Jésus, Gandhi, Bouddha, et Mahomet ainsi
Qu’Hessel, Morin, Rabhi et tant d’autres : MERCI.
Toi, moi, à notre tour, levons nos fronts honteux,
Affrontons joyeusement tous ces périls miteux.
Le vieux monde moribond, attend impatiemment
Que s’éveillent à la Vie, tous ses enfants aimants.




BON VENT à TOUTES et à TOUS

jeudi 28 mars 2013

123ème : 7 USED MERCI mille fois, cher COLIBRI Edgar MORIN


 

Comme d’habitude, il appartient au « Fou du Roi »(désigné FR), bien connu des lecteurs coutumiers, de frapper les trois coups rituels, en ouvrant ainsi ce 7ème épisode USED (Un Senior Enthousiaste de Demain).

 
1-FR : Cher « Sen(i)or Jacques » (SJ), pourrais-tu nous dire pourquoi ce billet, afin de permettre aux lecteurs d’en savoir un peu plus ?

 
SJ : Cher FR : J’ai choisi avant le « grand oral » de François Hollande ce soir, de vous proposer un véritable texte Politique (avec un P majuscule) d’Edgar Morin, un texte d’ESPOIR, écrit en 2011 sous le règne de l’ancien président, mais toujours d’actualité sous le règne du nouveau.  

Je l’ai découvert récemment sur un réseau social, bien connu, et je l’ai ainsi commenté :
« Merci mille fois, cher Edgar, que j'ai eu la chance de cotoyer avec Pierre Rabhi sur une tribune, lors du lancement de l’explosive campagne Colibris TNT (Transformons Nos Territoires), également appelée campagne "Tous Candidats" au changement. Bravo pour ces propos que je partage totalement et qui vont m'économiser l'écriture de propos très, très proches, mais de façon beaucoup plus laborieuse avec une crédibilité très faiblarde pour moi, par rapport à votre cheminement ».

Maintenant la (R)EVOLUTION COLIBRIS s’est engagée et la grand colibri Edgar Morin, lui-même, avait lancé un solennel appel « Colibris de toutes plumes, unissez-vous ».

2-FR : Avant d’abandonner mon rôle de questionneur, pourrais-tu nous introduire ce texte d’Edgar Morin ?

SR : Bien sûr. En préalable, j’aime beaucoup Edgar que j’ai déjà évoqué sur ce blog, à travers son ouvrage « La Voie ». Aujourd’hui, il s’agit précisément d’une interview pour le n°30 du mois de novembre 2011, de la revue TerraEco, dont le thème était, me semble-t-il : RALENTIR… vite !

En une phrase, ses propos, véritablement « titan(ic)esques », pourraient se résumer ainsi :
Edgar Morin : «  Nous avançons comme des somnambules vers la catastrophe  ».

3-TerraEco poursuit en introduisant ainsi son interview : « Que faire dans cette période de crise aiguë ? S’indigner, certes. Mais surtout agir. A 90 ans, le philosophe et sociologue Edgar Morin nous invite à résister au diktat de l’urgence. Pour lui, l’espoir est à portée de main ».

4-TerraEco : Pourquoi la vitesse est-elle à ce point ancrée dans le fonctionnement de notre société ?
Edgar Morin : La vitesse fait partie du grand mythe du progrès, qui anime la civilisation occidentale depuis le XVIIIe et le XIXe siècle. L’idée sous-jacente, c’est que nous allons grâce à lui vers un avenir toujours meilleur. Plus vite nous allons vers cet avenir meilleur, et mieux c’est, naturellement.

C’est dans cette optique que se sont multipliées les communications, aussi bien économiques que sociales, et toutes sortes de techniques qui ont permis de créer des transports rapides. Je pense notamment à la machine à vapeur, qui n’a pas été inventée pour des motivations de vitesse mais pour servir l’industrie des chemins de fer, lesquels sont eux-mêmes devenus de plus en plus rapides. Tout cela est corrélatif par le fait de la multiplication des activités et rend les gens de plus en plus pressés. Nous sommes dans une époque où la chronologie s’est imposée.

5-TerraEco : Cela est-il donc si nouveau ?

Dans les temps anciens, vous vous donniez rendez-vous quand le soleil se trouvait au zénith. Au Brésil, dans des villes comme Belém, encore aujourd’hui, on se retrouve « après la pluie ». Dans ces schémas, vos relations s’établissent selon un rythme temporel scandé par le soleil. Mais la montre-bracelet, par exemple, a fait qu’un temps abstrait s’est substitué au temps naturel.

Et le système de compétition et de concurrence – qui est celui de notre économie marchande et capitaliste – fait que pour la concurrence, la meilleure performance est celle qui permet la plus grande rapidité. La compétition s’est donc transformée en compétitivité, ce qui est une perversion de la concurrence.

 6-TerraEco : Cette quête de vitesse n’est-elle pas une illusion ?

En quelque sorte si. On ne se rend pas compte – alors même que nous pensons faire les choses rapidement – que nous sommes intoxiqués par le moyen de transport lui-même qui se prétend rapide. L’utilisation de moyens de transport toujours plus performants, au lieu d’accélérer notre temps de déplacement, finit – notamment à cause des embouteillages – par nous faire perdre du temps ! Comme le disait déjà Ivan Illich (philosophe autrichien né en 1926 et mort en 2002, ndlr) : « La voiture nous ralentit beaucoup. » Même les gens, immobilisés dans leur automobile, écoutent la radio et ont le sentiment d’utiliser malgré tout le temps de façon utile. Idem pour la compétition de l’information. On se rue désormais sur la radio ou la télé pour ne pas attendre la parution des journaux.

Toutes ces multiples vitesses s’inscrivent dans une grande accélération du temps, celui de la mondialisation. Et tout cela nous conduit sans doute vers des catastrophes.

 7-TerraEco : Le progrès et le rythme auquel nous le construisons nous détruit-il nécessairement ?

Le développement techno-économique accélère tous les processus de production de biens et de richesses, qui eux-mêmes accélèrent la dégradation de la biosphère et la pollution généralisée. Les armes nucléaires se multiplient et on demande aux techniciens de faire toujours plus vite. Tout cela, effectivement, ne va pas dans le sens d’un épanouissement individuel et collectif !

 8-TerraEco : Pourquoi cherchons-nous systématiquement une utilité au temps qui passe ?

 

Prenez l’exemple du déjeuner. Le temps signifie convivialité et qualité. Aujourd’hui, l’idée de vitesse fait que dès qu’on a fini son assiette, on appelle un garçon qui se dépêche pour débarrasser et la remplacer. Si vous vous emmerdez avec votre voisin, vous aurez tendance à vouloir abréger ce temps. C’est le sens du mouvement Slow Food dont est née l’idée de « slow life », de « slow time » et même de « slow science ». Un mot là-dessus. Je vois que la tendance des jeunes chercheurs, dès qu’ils ont un domaine, même très spécialisé, de travail, consiste pour eux à se dépêcher pour obtenir des résultats et publier un « grand » article dans une « grande » revue scientifique internationale, pour que personne d’autre ne publie avant eux. Cet esprit se développe au détriment de la réflexion et de la pensée. Notre temps rapide est donc un temps antiréflexif. Et ce n’est pas un hasard si fleurissent dans notre pays un certain nombre d’institutions spécialisées qui prônent le temps de méditation. Le « yoguisme », par exemple, est une façon d’interrompre le temps rapide et d’obtenir un temps tranquille de méditation. On échappe de la sorte à la chronométrie. Les vacances, elles aussi, permettent de reconquérir son temps naturel et ce temps de la paresse. L’ouvrage de Paul Lafargue Le droit à la paresse (qui date de 1880, ndlr) reste plus actuel que jamais car ne rien faire signifie temps mort, perte de temps, temps non-rentable.

 9-TerraEco : Pourquoi ?

Nous sommes prisonniers de l’idée de rentabilité, de productivité et de compétitivité. Ces idées se sont exaspérées avec la concurrence mondialisée, dans les entreprises, puis répandues ailleurs. Idem dans le monde scolaire et universitaire ! La relation entre le maître et l’élève nécessite un rapport beaucoup plus personnel que les seules notions de rendement et de résultats. En outre, le calcul accélère tout cela. Nous vivons un temps où il est privilégié pour tout. Aussi bien pour tout connaître que pour tout maîtriser. Les sondages qui anticipent d’un an les élections participent du même phénomène. On en arrive à les confondre avec l’annonce du résultat. On tente ainsi de supprimer l’effet de surprise toujours possible.

 10-TerraEco : A qui la faute ? Au capitalisme ? A la science ?

Nous sommes pris dans un processus hallucinant dans lequel le capitalisme, les échanges, la science sont entraînés dans ce rythme. On ne peut rendre coupable un seul homme. Faut-il accuser le seul Newton d’avoir inventé la machine à vapeur ? Non. Le capitalisme est essentiellement responsable, effectivement. Par son fondement qui consiste à rechercher le profit. Par son moteur qui consiste à tenter, par la concurrence, de devancer son adversaire. Par la soif incessante de « nouveau » qu’il promeut grâce à la publicité… Quelle est cette société qui produit des objets de plus en plus vite obsolètes ? Cette société de consommation qui organise la fabrication de frigos ou de machines à laver non pas à la durée de vie infinie, mais qui se détraquent au bout de huit ans ? Le mythe du nouveau, vous le voyez bien – et ce, même pour des lessives – vise à toujours inciter à la consommation. Le capitalisme, par sa loi naturelle – la concurrence –, pousse ainsi à l’accélération permanente, et par sa pression « consommationniste », à toujours se procurer de nouveaux produits qui contribuent eux aussi à ce processus.

 11-TerraEco : On le voit à travers de multiples mouvements dans le monde, ce capitalisme est questionné. Notamment dans sa dimension financière…
Nous sommes entrés dans une crise profonde sans savoir ce qui va en sortir. Des forces de résistance se manifestent effectivement. L’économie sociale et solidaire en est une. Elle incarne une façon de lutter contre cette pression. Si on observe une poussée vers l’agriculture biologique avec des petites et moyennes exploitations et un retour à l’agriculture fermière, c’est parce qu’une grande partie de l’opinion commence à comprendre que les poulets et les porcs industrialisés sont frelatés et dénaturent les sols et la nappe phréatique. Une quête vers les produits artisanaux, les Amap (Associations pour le maintien d’une agriculture paysanne, ndlr), indique que nous souhaitons échapper aux grandes surfaces qui, elles-mêmes, exercent une pression du prix minimum sur le producteur et tentent de répercuter un prix maximum sur le consommateur. Le commerce équitable tente, lui aussi, de court-circuiter les intermédiaires prédateurs. Certes, le capitalisme triomphe dans certaines parties du monde, mais une autre frange voit naître des réactions qui ne viennent pas seulement des nouvelles formes de production (coopératives, exploitations bio), mais de l’union consciente des consommateurs. C’est à mes yeux une force inemployée et faible car encore dispersée. Si cette force prend conscience des produits de qualité et des produits nuisibles, superficiels, une force de pression incroyable se mettra en place et permettra d’influer sur la production.

 12-TerraEco : Les politiques et leurs partis ne semblent pas prendre conscience de ces forces émergentes. Ils ne manquent pourtant pas d’intelligence d’analyse…

Mais vous partez de l’hypothèse que ces hommes et femmes politiques ont déjà fait cette analyse. Or, vous avez des esprits limités par certaines obsessions, certaines structures.

 13-TerraEco : Par obsession, vous entendez croissance ?

Oui ! Ils ne savent même pas que la croissance – à supposer qu’elle revienne un jour dans les pays que l’on dit développés – ne dépassera pas 2 % ! Ce n’est donc pas cette croissance-là qui parviendra à résoudre la question de l’emploi ! La croissance que l’on souhaite rapide et forte est une croissance dans la compétition. Elle amène les entreprises à mettre des machines à la place des hommes et donc à liquider les gens et à les aliéner encore davantage. Il me semble donc terrifiant de voir que des socialistes puissent défendre et promettre plus de croissance. Ils n’ont pas encore fait l’effort de réfléchir et d’aller vers de nouvelles pensées.

 14-TerraEco : Décélération signifierait décroissance ?

Ce qui est important, c’est de savoir ce qui doit croître et ce qui doit décroître. Il est évident que les villes non polluantes, les énergies renouvelables et les grands travaux collectifs salutaires doivent croître. La pensée binaire, c’est une erreur. C’est la même chose pour mondialiser et démondialiser : il faut poursuivre la mondialisation dans ce qu’elle créé de solidarités entre les peuples et envers la planète, mais il faut la condamner quand elle crée ou apporte non pas des zones de prospérité mais de la corruption ou de l’inégalité. Je milite pour une vision complexe des choses.

 15-TerraEco : La vitesse en soi n’est donc pas à blâmer ?

Voilà. Si je prends mon vélo pour aller à la pharmacie et que je tente d’y parvenir avant que celle-ci ne ferme, je vais pédaler le plus vite possible. La vitesse est quelque chose que nous devons et pouvons utiliser quand le besoin se fait sentir. Le vrai problème, c’est de réussir le ralentissement général de nos activités. Reprendre du temps, naturel, biologique, au temps artificiel, chronologique et réussir à résister. Vous avez raison de dire que ce qui est vitesse et accélération est un processus de civilisation extrêmement complexe, dans lequel techniques, capitalisme, science, économie ont leur part. Toutes ces forces conjuguées nous poussent à accélérer sans que nous n’ayons aucun contrôle sur elles. Car notre grande tragédie, c’est que l’humanité est emportée dans une course accélérée, sans aucun pilote à bord. Il n’y a ni contrôle, ni régulation. L’économie elle-même n’est pas régulée. Le Fonds monétaire international n’est pas en ce sens un véritable système de régulation.

 16-TerraEco : Le politique n’est-il pas tout de même censé « prendre le temps de la réflexion » ?

On a souvent le sentiment que par sa précipitation à agir, à s’exprimer, il en vient à œuvrer sans nos enfants, voire contre eux… Vous savez, les politiques sont embarqués dans cette course à la vitesse. J’ai lu une thèse récemment sur les cabinets ministériels. Parfois, sur les bureaux des conseillers, on trouvait des notes et des dossiers qualifiés de « U » pour « urgent ». Puis sont apparus les « TU » pour « très urgent » puis les « TTU ». Les cabinets ministériels sont désormais envahis, dépassés. Le drame de cette vitesse, c’est qu’elle annule et tue dans l’œuf la pensée politique. La classe politique n’a fait aucun investissement intellectuel pour anticiper, affronter l’avenir. C’est ce que j’ai tenté de faire dans mes livres comme Introduction à une politique de l’homme, La voie, Terre-patrie… L’avenir est incertain, il faut essayer de naviguer, trouver une voie, une perspective. Il y a toujours eu, dans l’Histoire, des ambitions personnelles. Mais elles étaient liées à des idées. De Gaulle avait sans doute une ambition, mais il avait une grande idée. Churchill avait de l’ambition au service d’une grande idée, qui consistait à vouloir sauver l’Angleterre du désastre. Désormais, il n’y a plus de grandes idées, mais de très grandes ambitions avec des petits bonshommes ou des petites bonnes femmes.

 17-TerraEco : Michel Rocard déplorait il y a peu pour « Terra eco » la disparition de la vision à long terme…

Il a raison, mais il a tort. Un vrai politique ne se positionne pas dans l’immédiat mais dans l’essentiel. A force d’oublier l’essentiel pour l’urgence, on finit par oublier l’urgence de l’essentiel. Ce que Michel Rocard appelle le « long terme », je l’intitule « problème de fond », « question vitale ». Penser qu’il faut une politique planétaire pour la sauvegarde de la biosphère – avec un pouvoir de décision qui répartisse les responsabilités car on ne peut donner les mêmes responsabilités à des pays riches et à des pays pauvres –, c’est une politique essentielle à long terme. Mais ce long terme doit être suffisamment rapide car la menace elle-même se rapproche.

 18-TerraEco : Le président de la République Nicolas Sarkozy (interview en novembre 2011) n’incarne-t-il pas l’immédiateté et la présence médiatique permanente ?

Il symbolise une agitation dans l’immédiateté. Il passe à des immédiatetés successives. Après l’immédiateté, qui consiste à accueillir le despote libyen Kadhafi car il a du pétrole, succède l’autre immédiateté, où il faut détruire Kadhafi sans pour autant oublier le pétrole… En ce sens, Sarkozy n’est pas différent des autres responsables politiques, mais son caractère versatile et capricieux en fait quelqu’un de très singulier pour ne pas dire un peu bizarre.

 19-TerraEco : Edgar Morin, vous avez 90 ans. L’état de perpétuelle urgence de nos sociétés vous rend-il pessimiste ?

Cette absence de vision m’oblige à rester sur la brèche. Il y a une continuité dans la discontinuité. Je suis passé de l’époque de la Résistance où j’étais jeune, où il y avait un ennemi, un occupant et un danger mortel, à d’autres formes de résistances qui ne portaient pas, elles, de danger de mort, mais celui de rester incompris, calomnié ou bafoué. Après avoir été communiste de guerre et après avoir combattu l’Allemagne nazie avec de grands espoirs, j’ai vu que ces espoirs étaient trompeurs et j’ai rompu avec ce totalitarisme-là, devenu ennemi de l’humanité. J’ai combattu cela et résisté. J’ai ensuite – naturellement – défendu l’indépendance du Vietnam ou de l’Algérie, quand il s’agissait de liquider un passé colonial. Cela me semblait si logique après avoir lutté pour la propre indépendance de la France, mise en péril par le nazisme. Au bout du compte, nous sommes toujours pris dans des nécessités de résister.

 20-TerraEco : Et aujourd’hui ?

Aujourd’hui, je me rends compte que nous sommes sous la menace de deux barbaries associées. Humaine tout d’abord, qui vient du fond de l’histoire et qui n’a jamais été liquidée : le camp américain de Guantánamo ou l’expulsion d’enfants et de parents que l’on sépare, ça se passe aujourd’hui ! Cette barbarie-là est fondée sur le mépris humain. Et puis la seconde, froide et glacée, fondée sur le calcul et le profit. Ces deux barbaries sont alliées et nous sommes contraints de résister sur ces deux fronts. Alors, je continue avec les mêmes aspirations et révoltes que celles de mon adolescence, avec cette conscience d’avoir perdu des illusions qui pouvaient m’animer quand, en 1931, j’avais dix ans.

 21-TerraEco : La combinaison de ces deux barbaries nous mettrait en danger mortel…

Oui, car ces guerres peuvent à tout instant se développer dans le fanatisme. Le pouvoir de destruction des armes nucléaires est immense et celui de la dégradation de la biosphère pour toute l’humanité est vertigineux. Nous allons, par cette combinaison, vers des cataclysmes. Toutefois, le probable, le pire, n’est jamais certain à mes yeux, car il suffit parfois de quelques événements pour que l’évidence se retourne.

 22-TerraEco : Des femmes et des hommes peuvent-ils aussi avoir ce pouvoir ?
Malheureusement, dans notre époque, le système empêche les esprits de percer. Quand l’Angleterre était menacée à mort, un homme marginal a été porté au pouvoir, qui se nommait Churchill. Quand la France était menacée, ce fut De Gaulle. Pendant la Révolution, de très nombreuses personnes, qui n’avaient aucune formation militaire, sont parvenues à devenir des généraux formidables, comme Hoche ou Bonaparte ; des avocaillons comme Robespierre, de grands tribuns. Des grandes époques de crise épouvantable suscitent des hommes capables de porter la résistance. Nous ne sommes pas encore assez conscients du péril. Nous n’avons pas encore compris que nous allons vers la catastrophe et nous avançons à toute allure comme des somnambules.

 23-TerraEco : Le philosophe Jean-Pierre Dupuy estime que de la catastrophe naît la solution. Partagez-vous son analyse ?

Il n’est pas assez dialectique. Il nous dit que la catastrophe est inévitable mais qu’elle constitue la seule façon de savoir qu’on pourrait l’éviter. Moi je dis : la catastrophe est probable, mais il y a l’improbabilité. J’entends par « probable », que pour nous observateurs, dans le temps où nous sommes et dans les lieux où nous sommes, avec les meilleures informations disponibles, nous voyons que le cours des choses nous emmène à toute vitesse vers les catastrophes. Or, nous savons que c’est toujours l’improbable qui a surgi et qui a « fait » la transformation. Bouddha était improbable, Jésus était improbable, Mahomet, la science moderne avec Descartes, Pierre Gassendi, Francis Bacon ou Galilée était improbables, le socialisme avec Marx ou Proudhon était improbable, le capitalisme était improbable au Moyen-Age… Regardez Athènes. Cinq siècles avant notre ère, vous avez une petite cité grecque qui fait face à un empire gigantesque, la Perse. Et à deux reprises – bien que détruite la seconde fois – Athènes parvient à chasser ces Perses grâce au coup de génie du stratège Thémistocle, à Salamine. Grâce à cette improbabilité incroyable est née la démocratie, qui a pu féconder toute l’histoire future, puis la philosophie. Alors, si vous voulez, je peux aller aux mêmes conclusions que Jean-Pierre Dupuy, mais ma façon d’y aller est tout à fait différente. Car aujourd’hui existent des forces de résistance qui sont dispersées, qui sont nichées dans la société civile et qui ne se connaissent pas les unes les autres. Mais je crois au jour où ces forces se rassembleront, en faisceaux. Tout commence par une déviance, qui se transforme en tendance, qui devient une force historique. Nous n’en sommes pas encore là, certes, mais c’est possible.

 24-TerraEco : Il est donc possible de rassembler ces forces, d’engager la grande métamorphose, de l’individu puis de la société ?

Ce que j’appelle la métamorphose, c’est le terme d’un processus dans lequel de multiples réformes, dans tous les domaines, commencent en même temps.

 25-TerraEco : Nous sommes déjà dans un processus de réformes…

Non, non. Pas ces pseudo-réformes. Je parle de réformes profondes de vie, de civilisation, de société, d’économie. Ces réformes-là devront se mettre en marche simultanément et être intersolidaires.

 26-TerraEco : Vous appelez cette démarche « le bien-vivre ». L’expression semble faible au regard de l’ambition que vous lui conférez.

L’idéal de la société occidentale – « bien-être » – s’est dégradé en des choses purement matérielles, de confort et de propriété d’objet. Et bien que ce mot « bien-être » soit très beau, il fallait trouver autre chose. Et quand le président de l’Equateur Rafael Correa a trouvé cette formule de « bien-vivre », reprise ensuite par Evo Morales (le président bolivien, ndlr), elle signifiait un épanouissement humain, non seulement au sein de la société mais aussi de la nature. L’expression « bien vivir » est sans doute plus forte en espagnol qu’en français. Le terme est « actif » dans la langue de Cervantès et passif dans celle de Molière. Mais cette idée est ce qui se rapporte le mieux à la qualité de la vie, à ce que j’appelle la poésie de la vie, l’amour, l’affection, la communion et la joie et donc au qualitatif, que l’on doit opposer au primat du quantitatif et de l’accumulation. Le bien-vivre, la qualité et la poésie de la vie, y compris dans son rythme, sont des choses qui doivent – ensemble – nous guider. C’est pour l’humanité une si belle finalité. Cela implique aussi et simultanément de juguler des choses comme la spéculation internationale… Si l’on ne parvient pas à se sauver de ces pieuvres qui nous menacent et dont la force s’accentue, s’accélère, il n’y aura pas de bien-vivre.

 Un grand merci également à TerraEco.