Bonjour à toutes et à tous. Il est grand temps avant
que ne s’achève l’été 2012, de venir alimenter ce blog en ouvrant ce 4ème
billet/épisode du feuilleton USED (Un
Senior Enthousiaste de Demain). Comme je l’ai déjà exprimé, j’ai participé cet
été à deux évènements importants « Dialogues en Humanité » du 6 au 8 juillet à Lyon, suivi dans la foulée du 5ème Festival Emmaüs Lescar Pau du 24
au 26 juillet pour les 30 ans d’Emmaüs en Béarn.
Après mon précédent billet/regard sur « Dialogues en Humanité »,
j’avais envisagé dans le même esprit, de centrer cet épisode sur ce « Festival
Emmaüs », qui en fait se voulait le 1er « Forum Mondial de la Pauvreté », il
en sera question bien sûr en final, mais j’ai préféré vagabonder autour d’un
intitulé énigmatique « Intermède : le Fou du Roi, l’Art
d’être grand-père, Transition… ».
Le Fou du Roi (FR) : cher Senior Jacques (SJ), merci de me donner
à nouveau la parole pour te soumettre à mon inlassable questionnement. D’abord
pourquoi ce titre bizarre et fourre-tout ?
SJ : d’accord, tu souhaites donc pour
démarrer une brève explication de textes. Allons-y :
« Intermède », j’aime ce mot qui est léger, qui est effectivement
fourre-tout, qui permet de vagabonder, de batifoler, de lâcher prise, de
prendre son temps, d’être déjà dans une transition paisible, de ne devoir
rendre de comptes à personne, …
Quant au « Fou du Roi », il suffit de survoler les deux épisodes précédents
pour mieux te connaître et je me rends compte que je ne peux plus me passer de
toi et donc je voudrais, pardon pour ta modestie naturelle, justifier un peu
plus, tout l’intérêt que je te porte.
« L’art d’être grand-père » : « une grande joie et
une lourde charge » comme je le résume souvent et comme nous avons pu
l’expérimenter chez nous, durant quatre semaines consécutives, au cours de ce
bel été, avec Simon 13 ans et sa sœur Camille 5 ans et demi. Nous avons
également, à plusieurs reprises, pu bénéficier de la compagnie apaisante de notre
petit Gaël, 1an et demi.
L’image jointe de nos deux « grands » a été prise, dans la
joyeuse excitation d’une première nuit sous
la tente pour la Miss, en solo dans notre jardin avec son frère, juste avant
l’extinction « théorique » des feux.
« Transition » : transition/mutation/métamorphose.
Depuis quelques mois, je suis clairement dans ce nouvel état, cette situation
de transition, que j’aime beaucoup et je m’accorde du temps, jusqu’en octobre
2014 (mes 70 ans) pour discerner, parmi les dizaines de vie potentielles à
venir, celle qui me permettra de vivre pleinement les prochaines
décennies !
FR : Oh SJ, je suis impatient
d’entrer au coeur du sujet. Tu sembles porter un vif intérêt au Fou du Roi que je suis, explique-moi
pourquoi ?
SJ : Oh FR, il faut donc que j’avoue.
C’est la 6ème fois que tu m’accompagnes, d’abord lors de 3 émissions
radio, ensuite lors des 2 derniers épisodes et aujourd’hui, et sans aucun
doute, encore demain.
J’ai eu l’occasion de te présenter : tu es mon double, le meilleur de
moi-même, ma conscience, mon exigence, ma partie lumineuse, ma force, ma
sagesse, mon ange gardien, mon asymptote,... Je pourrais compléter en
m’appuyant sur d’autres, en disant à la manière de Frédéric Lenoir que tu es
mon « âme du monde », avec Majid Rahnema dont je reparlerai, que tu
es ma « puissance de dedans », avec Teilhard de Chardin que tu es l’« Omega »
de mon « Alpha », … nous sommes inséparables, je suis toi, tu es moi,
nous sommes deux en un, nous sommes un et deux, soit le multiple élémentaire en
une seule personne.
Avec toi, s’effectue en moi, en nous deux, l’extraordinaire alchimie qui fait
passer du un au multiple, de l’individu au collectif de base, de la solitude à
la fraternité. Gandhi disait que « nous
devons être le changement que nous voulons pour le monde » et
l’astrophysicien Laurent Nottale,
candidat à la succession d’Einstein, exprime quasiment la même chose dans sa
théorie de la « relativité
d’échelle », qui devrait permettre de concilier la mécanique quantique
et la relativité générale d’Einstein, dans un Univers fractal. Il nous dit,
qu’à l’échelle près, ce sont les mêmes lois simples qui s’appliquent partout, à
l’image des « poupées russes », des paraboles, avec la force de
l’analogie. Chacun est fait d’ombres et de lumière, chacun possède son lumineux
fou du roi qu’il appelle comme il veut, qui est la belle personne qui est en
chacun de nous. Avec le fou du roi, nous ne sommes jamais seuls et le dialogue
avec un autre soi-même est toujours constructif pour avancer sur le chemin de
la Vie : « deviens ce que tu
es ». Si j’ai évoqué Gandhi et Laurent Nottale, c’est aussi pour
exprimer que la question, et donc la recherche, sont identiques pour le monde et
pour chaque homme : il existe le vieil homme et le vieux monde, il existe
aussi l’homme nouveau et le nouveau monde et entre les deux l’homme en
transition et le monde en transition, comme j’ai détaillé précédemment ces trois mondes.
Au-delà de ces considérations de fond, mon cher fou du roi, j’apprécie le
rythme qui est donné par tes questions parfois impertinentes et j’ai plaisir à y
répondre sans me soucier d’assurer des transitions. Je trouve également que je
suis amené à me livrer encore plus authentiquement. De plus, il me semble que
pour ceux qui trouveraient quelques menus intérêts à ces propos, le dialogue
entre nous est plus supportable qu’un épuisant monologue et il en est de même
pour l’écriture qui est, pour moi, plus aisée.
FR : Merci SJ pour cette déclaration
d’amour à mon endroit. Revenons à l’intitulé de ce billet. Si j’ai bien compris,
« l’Art d’être grand père »
a été un exercice important cet été pour votre couple ?
SJ : Ah oui, c’est ben vrai. Nous
sommes des grands parents comblés, qui assumons avec grande joie
l’accompagnement de nos petits. L’ex-moniteur de colonies que je fus jadis, a
toujours eu des engagements auprès de jeunes de tous âges, aussi, sans nous
substituer à l’éducation parentale, avec mon épouse, qui aime aussi beaucoup
les enfants, nous avons essayé de passer de bonnes vacances ensemble, en nous
répartissant les rôles et en conciliant l’utile à l’agréable. La dimension joyeuse
et festive était de mise et nous avons, au cours de ces longues semaines,
balayé de nombreuses activités de toutes natures, qui peuvent se répartir en
grandes catégories : 1-activités sportives (vélo, accro branche, piscine,
camping,...) 2-visites/fêtes/sorties (donjon des aigles, remontée de rivière,
..) 3- maison et divers chantiers (cuisine, bricolage, jardinage, lecture/TV,
dessin…) 4- rencontres (autres jeunes, famille élargie, amis,..).
Il va de soi que la question du « vivre ensemble » était
permanente avec la notion d’apprentissage festif et qu’il a été très
intéressant de chercher le meilleur équilibre pour « notre
collectif », en jouant de toute notre affectueuse autorité. Un carnet de
voyages, avec de nombreuses images légendées, a permis de garder trace de ces
vacances.
FR : SJ, parlons maintenant de la
« Transition », que tu dis
« aimer beaucoup ». Qu’est-ce
que tu peux nous en dire aujourd’hui, nous qui n’avons pas la chance, d’avoir
ton âge ?
SJ : Assurément, je suis entré, en
voyage dans cet état de transition et je l’aime beaucoup, car je commence assez
bien à voir ce que pourrait être demain :
-cette transition exprime en quelque sorte aux amis, que je tire ma révérence à une vie très active, à 50 ans
d’engagements lourds après avoir lu, approuvé et pris à la lettre cet
extraordinaire commandement « chacun de nous est responsable de la
trajectoire du monde », à 15 ans de vie post-professionnelle
particulièrement chargée, et à un passionnant septennat « Colibris »
au service de la Terre et de l’Humanisme, en proximité avec l’ami Pierre Rabhi,
-demain sera d’abord, une nouvelle
relation au temps, en baissant impérativement une cadence que je
m’imposais, sans aller encore jusqu’à l’« éloge de la lenteur », mais avec
un bel équilibre de vie prévisible,
-une évolution des priorités pour aller vers encore plus de proximité, bien sûr d’abord au niveau familial, mais aussi,
sans aucun doute, auprès des plus fragiles, des plus démunis, des plus cabossés
de la vie, avec quatre axes : les
jeunes, les malades, les personnes âgées, les handicapés,
-être plus dans l’accompagnement, dans la proposition, dans la réponse à
des interrogations que dans l’action et la responsabilité directe, en apportant
ce que la vie m’a appris,
-une poursuite, à dose raisonnable, de mes travaux de recherche (recherche méthodologique notamment) sur le
« Vivre ensemble » et la "Reliance généralisée" en m’appuyant sur les actions multiples et expérimentations
diverses conduites par le passé mais aussi sur les opportunités et rencontres présentes,
-la vie est faite de « programmé et d’inopiné » : moins de
programmé et plus d’inopiné en perspective,
-la poursuite et la réduction des engagements en cours, à un rythme moins
intense,
-le plus difficile pour moi : accepter de ne pas faire, même si je
sais, même si je peux, même si je veux,
-dans cette phase de transition,
esquisser, expérimenter et « discerner, parmi les dizaines de vie
potentielles à venir, celle qui me permettra de vivre pleinement les prochaines
décennies ! »
FR : Merci SJ pour ces
perspectives. Pourrais-tu commenter les quelques images qui illustrent, me
semble-t-il, cette phase de transition.
SJ : Une image prise, à Palavas, où
notre fils aîné lance avec un ami une entreprise de SUP (S pour Stand, U pour Up, P pour Paddle). Je crois à ce projet, je le suis en proximité
paternelle et « à la bonne distance », car le SUP est cohérent avec
les valeurs souhaitées pour le monde de demain, et il est compatible avec tous
les âges, du jardin d’enfants à la maison de retraite. Il est possible, même pour
un senior, de faire de la gymnastique, du yoga sur la planche, ce qui est
excellent pour améliorer son équilibre. Je me suis même prêté au jeu un instant,
au 2ème plan, avec mon commentaire « Superbe
captation d'un court instant d'équilibre, il faut bien l'avouer !!! »
Une image concerne le film « Intouchables »,
qui m’a beaucoup touché, avec la belle phrase inscrite : « l’amitié,
c’est la chaleur du cœur contre les intempéries de la vie ». J’ai toujours
eu une tendresse pour le monde des handicapés, j’y ai beaucoup d’amis et
j’accentue cette attention, notamment en accompagnant de diverses façons des
malades et des handicapés. J’ai une grande affection pour Virginie et Franck et
leur tout jeune Mathys, pour Joël, pour Elisabeth, sans oublier toutes celles
et tous ceux que j’ai connus à l’association "Vivre Ensemble » à Os-Marsillon".
Une dramatique image, tellement banale, de la faim en Afrique, que j’ai commentée ainsi sur un réseau
social :
« Bouleversé
comme toujours, ici et là-bas, par ces images qui expriment notre inintelligence
collective, car aujourd'hui, on sait régler les problèmes de la faim dans
le monde. Honte collective à nous, hommes politiques, financiers pervers et
citoyens endormis, tous unis main dans la main dans cette irresponsabilité
partagée ».
Mon bouleversement, contre notre stupidité collective, ne date pas d’hier,
puisque j’ai retrouvé dans mes archives un résumé d’ouvrage intitulé « Géopolitique de la faim » de Josué
de Castro. Le livre référence alors avait été écrit en 1956 et j’en avais fait un
résumé de 6 pages de mon écriture « patte de mouche » le 19 mai 1967.
Les temps ont changé, j’ai du lire des milliers d’ouvrages dans ma vie et j’ai
du en résumer plusieurs centaines en 5, 20 ou parfois 40 pages : quelle
folle énergie dépensée, avant l’existence du copier/coller.
FR : Comme promis pour achever ce
billet, pourrais-tu nous parler de ce 1er « Forum mondial de la pauvreté » à Emmaüs Lescar Pau ?
SJ : J’avais envisagé de vous faire
partager mon regard sur ce forum mais j’ai trouvé plus bref et encore mieux en
quatre temps :
-d’abord vous signaler qu’un ouvrage a été édité qui synthétise mieux que
je n’aurais pu le faire les actes de ce 1er
« forum mondial de la pauvreté ». Ce document, intitulé « Les pauvres entre mépris et dignité »
sous-titré « Que peuvent nous apprendre les cultures populaires ? »
aux éditions Golias, sous la direction de Germain Sarhy (responsable depuis 30
ans de cette mythique communauté d’Emmaüs Lescar Pau) et de Paul Ariès,
regroupe les interventions préalables d’une vingtaine d’intervenants, sous la
Présidence d’honneur de Jean Ziegler,
-ensuite vous communiquer une video, accessible par un simple clic, qui
donne la tonalité de ce forum, à travers un dialogue entre Germain et Paul, les deux porteurs du projet,-également par une galerie d’images du « forum « pauvreté », que j’ai prises et mises sur le réseau colibris.
-et enfin par une attention particulière portée à un grand senior (88 ans) que j’ai eu la chance de côtoyer à deux reprises au mois de juillet, à la fois aux « Dialogues en Humanité » à Lyon, ainsi qu’au « Forum Mondial de la Pauvreté » à Emmaüs. Il s’agit de Majid Rahnema : diplomate et ancien ministre, il a représenté l'Iran à l'ONU, ancien membre du Conseil exécutif de l'UNESCO, il se consacre depuis plus de vingt ans, au problème de la pauvreté. Il a publié "Quand la misère chasse la pauvreté » en 2003 et "La puissance des pauvres" en 2008 aux éditions Actes Sud.
L’ultime image de ce billet montre le beau visage de cette belle personne. Les ultimes mots de ce billet reviendront donc à Majid Rahnema, et personnellement, je les trouve particulièrement pertinents et percutants :
« Au cours de la première décennie de notre siècle, le fossé s’est profondément élargi entre les ultra-appauvris acculés à la misère matérielle et les ultra-enrichis formant la misère morale. L’impression se confirme que nous vivons déjà dans un entre-monde « sandwiché » entre deux couches de populations formant les deux formes extrêmes de la misère humaine ».
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